dimanche 18 février 2018

Ethiopie - Vie quotidienne (3)

Il faut remettre nos pendules à l'heure. Pas seulement à cause du décalage horaire de 2 heures avec la France ... Les Ethiopiens ont une curieuse façon de compter les heures. Si les journées sont divisées comme chez nous en 2 périodes de 12 heures, le décompte des heures ne se fait pas à partir de minuit mais à partir de 6 h du matin. Ainsi, lorsque le soleil est au zénith (midi), c'est la sixième heure de la journée, la première heure coïncidant à peu près à l'aube, c'est à dire après la douzième heure de nuit. Lorsque un Ethiopien fixe un rendez-vous à 8 h par exemple, il est préférable de se faire préciser s'il s'agit de l'heure éthiopienne soit donc 8+6=14 h à l'heure décomptée à notre manière, ou de l'heure solaire c'est à dire 8 h du matin ! Dans quelques hôtels, la réception dispose de 2 pendules pour que les touristes étrangers s'y retrouvent.
Les Ethiopiens utilisent le calendrier julien et pas, comme nous, le calendrier grégorien (11 jours de décalage entre les 2 calendriers). Quand on est le 19 janvier chez nous par exemple, on est l'équivalent du 8 janvier en Ethiopie. Voilà pour le jour. Maintenant pour les mois; chaque année comporte 12 mois de 30 jours et un 13ème "mois" de 5 ou 6 jours, tout comme le calendrier révolutionnaire français (vous vous souvenez, thermidor, floréal et autres ventôse ...). Enfin, les années. En 2018 de chez nous, c'était l'année 2010 pour les Ethiopiens car ils utilisent comme origine de l'ère chrétienne l'Incarnation de Jésus qu'ils situent à la date du 25 mars de l'an 9 du calendrier julien. Pour couronner le tout, le nouvel an éthiopien commence le 11 septembre. 
Vous aurez compris que nous n'avons jamais utilisé cette manière de décompter le temps et que nous nous sommes fiés à la science de notre guide Maleku pour faire tous les calculs de correspondance !

La nourriture éthiopienne est, elle aussi, très différente de la nôtre. Je ne parle évidemment pas de la "gastronomie internationale" - à base de filets de poisson grillés, frites, goulash, spaghettis, pizzas et même hamburgers - mais des plats dont se nourrissent les Ethiopiens. La base de l'alimentation, c'est l'injera, une galette de teff, une céréale locale pleine de protéines, de fer et de calcium, et dépourvue de gluten. La nourriture idéale pour les végétaliens ... L'injera est servie à tous les repas, du petit déjeuner au dîner.
Préparation traditionnelle de l'injera

L'injera est garnie, selon les plats, de viande coupée en petits morceaux et ultra-cuite, de poisson -tilapia ou perche du Nil-, de légumes verts, lentilles ou bien encore d'une pâte de pois chiches. La garniture est la plupart du temps extrêmement épicée. La viande est souvent tellement dure qu'elle peut être immangeable. Je pense en particulier à une soirée dans un restaurant d'Axum où Melaku nous a emmené goûter le cabri d'un chef éthiopien réputé ... J'en suis sorti en proclamant "le cabri, c'est fini !".

Un plat que j'ai bien aimé, même si j'ai pris quelques risques étant donnée le manque d'hygiène, c'est le ketfo, une sorte de tartare de boeuf mélangé avec une épice et du beurre assaisonné, et accompagné de fromage frais et de légumes verts. 

Pour manger, on se sert de ses doigts, mais uniquement de ceux de sa main droite, car, comme dans les pays arabes, la main gauche est impure. Comme dans les pays musulmans, on ne mange pas de porc. Sa consommation est proscrite aussi bien chez les musulmans que chez les chrétiens orthodoxes.

On ne sert pratiquement jamais de dessert dans les restaurants éthiopiens. Il faut donc s'acheter des fruits au bord de la route : bananes (excellentes), papayes (bonnes ... comme des papayes), mangues (excellentes mais rares parce que ce n'est pas la saison). Une seule fois, Michèle a goûté une crêpe au miel mais ici, le miel est mélangé avec de la cire ...

Les jus de fruits frais sont en fait des fruits mixés sous forme de pulpe. Une découverte, le jus d'avocat, mélangé avec de la papaye, de l'ananas ou de la mangue ... 

Au rayon boissons, on trouve des bonnes bières : Saint-Georges, Dashen, ... et des vins très médiocres. Seul le vin rouge doux est un peu meilleur. On fabrique aussi de l'hydromel, une boisson fermentée à base de miel et d'eau, et de l'arak, une eau de vie de vin.

La préparation du café, principal produit d'exportation de l'Ethiopie, fait l'objet d'une cérémonie  très particulière pendant laquelle on fait brûler de l'encens.

En Ethiopie, il ne faut pas être pressé pour manger. Partout, il faut systématiquement une heure entre la prise de commande d'un plat et le moment où il arrive sur la table, quelquefois tout juste tiède. Les cuisines ne sont pas équipées du matériel que nous avons dans les nôtres et rien n'est préparé à l'avance.

Manger ne coûte pas cher pour nous, touristes occidentaux ; environ 150 birrs (soit 4,5 €) par repas de 1 plat + 1 boisson. 1 kilo de bananes ou de mangues coûte 20 birrs (0,6 €) ... et encore, on nous applique des prix pour farangis (étrangers) ! Le prix des souvenirs (vannerie, petites sculptures, bracelets) est aussi ridiculement bas, quelques euros tout au plus. 
Melaku nous dit que le salaire moyen mensuel des Ethiopiens est de 4000 birrs, soit 130 € et qu'un appartement de 2 chambres, salon, cuisine, salle de bains à Addis coûte environ 15 000 €. Les salaires et les prix sont au moins 10 fois plus faibles que chez nous. On comprend alors que l'Occident ait un effet d'attraction irrésistible pour tous ceux qui vivent mal... Touristes étrangers, n'hésitez pas à mieux payer les guides, les chauffeurs, les cuisiniers, les artisans, vous éviterez de les retrouver, eux ou leurs familles, parmi les migrants économiques !

Sauf dans les grands hôtels ou pour acheter des souvenirs un peu plus onéreux -comme les croix ciselées- , on ne peut pas payer en euros ou en dollars. Il faut donc changer à la banque. Et là aussi, il faut s'armer de patience parce que les procédures sont plutôt bureaucratiques. Le guichetier doit noter toutes les coordonnées du passeport sur un grand registre, puis remplir un formulaire, avant de passer le dossier au caissier qui doit compter un nombre impressionnant de billets de banque (surtout des coupures de 100 birrs, soit 3 €). Quand j'ai changé 200 € à la banque d'Addis-Abeba, je me suis donc retrouvé avec 70 billets ...
 billet de 100 birrs
Les postes éthiopiennes ne manquent pas d'intérêt. Il n'y en a d'abord que très peu, et il faut beaucoup chercher pour en trouver une ouverte. Quelquefois, on doit être fouillé à corps pour y pénétrer et laisser son appareil photo dans un casier dont le ou les gardes ne manqueront pas de demander à la sortie un petit bakchich. Leurs bureaux sont en général misérables, surtout en comparaison de ceux des banques. Les employés sont serviables - l'un d'entre eux m'a collé tous les timbres sur mes cartes postales !- mais quelquefois démunis - une autre fois, on m'a dit de revenir dans 3 jours parce qu'il n'y avait plus de timbres. Avec ça, nos cartes n'ont pas mis plus de 3 semaines pour arriver en France !
 La poste de Lalibela, un des endroits les plus touristiques d'Ethiopie tout de même ...
Le bureau de poste, le postier a malgré tout un ordinateur
 la boîte aux lettres et les boîtes postales (il n'y a pas de facteurs en Ethiopie)
Une chance que j'aie pu photographier ce lieu parce qu'ici, normalement, il est interdit de photographier les bâtiments officiels, tout comme les casernes, les militaires, les policiers, ... Peut-être pour éviter de donner des informations à d'éventuels jihadistes ou trafiquants d'armes ou de khat , cette plante psychotrope très largement consommée en Ethiopie ?

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