La
ville de Belgrade est située au confluent du Danube et de la Save.
Elle
a été longtemps à la frontière de 2 mondes : chrétien et
musulman (Autriche et Empire Ottoman), puis catholique et orthodoxe
(Autriche-Hongrie et Serbie). Les Turcs y ont construit l'énorme
forteresse Kalemegdan qui domine la vallée du Danube.
Cette statue a fait scandale quand elle a été installée dans le parc. Cachez ce sexe que je ne saurais voir ... Alors, on l'a mis face à la pente et au Danube. Mais avec un zoom ...
Une statue intitulée «A la France» inaugurée
en 1930 rappelle les longues relations d'amitié qui ont autrefois
existé entre la France et la Serbie depuis 1914.
L'inscription dit « Nous aimons la France comme elle nous a
aimés ».
Est-ce
toujours d'actualité, maintenant que la France a participé en 1999 aux
frappes de l'OTAN sur Belgrade pendant la Guerre du
Kosovo ? Il en reste encore des traces, comme ces ouvertures béantes
dans la façade du Ministère de la Défense, laissées en l'état
comme pour se souvenir de ce que la Serbie a vécu comme une
injustice.
Nous
sommes encore et toujours poursuivis par les conséquences des
derniers conflits des Balkans. Il faut dire que le pouvoir serbe de
Milosevic – un nationaliste ex-communiste - porte une
responsabilité écrasante dans cette succession de massacres
perpétrés dans les années 1990 en Croatie, en Bosnie et au Kosovo
contre tous ceux qui n'étaient pas serbes. Mais notre guide Milica,
51 ans et 3 enfants, pourtant hostile à Milosevic et aux
nationalistes, reste très sceptique sur le point de vue véhiculé
par les médias occidentaux quant à la responsabilité exclusive des
Serbes. Elle est nostalgique de l'époque de la Yougoslavie unie qui
regroupait jusqu'à la fin des années 80 Serbes, Croates, Slovènes,
Bosniaques et Macédoniens. Mais depuis, la roue de l'Histoire a
tourné et la Serbie s'est retrouvée sur le banc des accusés.
Contrairement à la Slovénie et la Croatie, elle n'a pas été
autorisée à rejoindre l'UE, refusant de reconnaître ses
responsabilités dans les massacres de Srebenica et Zepa en Bosnie (8000 hommes exécutés),
de Vukovar en Croatie (environ 300 exécutés), et de reconnaître l'indépendance du Kosovo,
une région peuplée majoritairement d'Albanais musulmans. Difficile
à la Serbie d'accepter qu'elle perde le Kosovo, une région qui a
été historiquement le creuset de la nation serbe il
y a 7 siècles ! Impossible de s'abstraire de son
passé, de son histoire.
Milica
regrette le temps de la Yougoslavie, même si elle pense que son dirigeant d'alors,
Tito, était un dictateur. Moins féroce cependant que ses homologues
des pays de l'Est. La vie était plus facile qu'aujourd'hui, le
niveau de vie était plus élevé, dit Milica. Tito était surtout un grand homme d'état respecté au plan international, le créateur
avec l'Indien Nehru et l'égyptien Nasser du Mouvement des Non-alignés (ce qu'on appelle maintenant le Tiers-Monde). Il était
connu et respecté dans le monde entier. 200 personnalités du monde
entier ont d'ailleurs assisté à ses obsèques nous rappelle
Milica. Elle lui reproche cependant d'avoir pratiqué le culte de la
personnalité - chaque république de la Yougoslavie avait son
Titograd par exemple - et surtout de n'avoir pas su préparer sa succession. La
position de Milica n'est d'ailleurs pas unique. Tito a encore des
partisans un peu partout en ex-Yougoslavie, surtout, il faut le dire, des personnes âgées dont le niveau de vie s'est fortement dégradé
depuis que les retraites ont été amputées et que le système de
santé est devenu moins favorable.
Il
est vrai que depuis 25 ans les choses ne vont pas bien en Serbie. Le
pays a d'abord subi pendant l'ère Milosevic une inflation galopante.
On vend d'ailleurs comme souvenir des billets de 500 milliards de
dinars datant de 1993 !
Après
les guerres qui ont mis le pays à genoux, les frappes de l'OTAN, un
embargo économique décrété par l'ONU puis les mesures récemment imposées par le FMI pour que la Serbie obtienne un prêt de 1 milliard d'euros ont fini de mettre à bas l'économie de
la Serbie.
Même le retour de la démocratie n'a pas comblé les
espoirs que les Serbes mettaient en elle. Les démocrates
pro-européens ont dû quitter le pouvoir à la suite de grands
scandales de corruption où il a été démontré qu'ils avaient mis la
main dans la caisse. Maintenant, les nationalistes ont repris le
pouvoir … Selon Milica, la corruption est généralisée et 104
partis se disputent les faveurs des électeurs. Du coup, elle fait la
grève du vote, signe de désabusement face à la situation du pays
et d'un certain désespoir de ne pas voir les choses changer
favorablement.
Une
visite rapide de la ville permet de voir qu'elle voir qu'elle est
malgré tout – ou plutôt qu'elle a été - plus riche que ses
équivalentes roumaine et bulgare.
Comme
dans beaucoup de pays de la région, l'influence de la culture
américaine se fait sentir. Ici un artiste expose ses sculptures de
«Transformers » dans la rue.
Dans
les quartiers populaires de Belgrade, les immeubles sont en piteux
état, mais Milica dit que beaucoup de gens ont acheté à des prix
ridiculement bas des maisons de campagne qu'ils s'attachent à
rénover et dans laquelle ils cultivent un petit potager pour
améliorer leur ordinaire. Avec des salaires mensuels moyens de 400 €
et un coût de la vie équivalent au nôtre (sauf les loyers), il
devient indispensable de produire une bonne partie de son
alimentation.
La
suite de notre programme nous permet de visiter la petite église
orthodoxe Sainte-Sava, magnifiquement décorée.
A
proximité, on construit avec l'aide de généreux donateurs, serbes
émigrés ou russes (Poutine a promis son aide), une gigantesque
basilique orthodoxe qu'on appelle le Temple et qui sera le siège du
patriarcat serbe. La Sagrada Familia, version orthodoxe. Il faudra
encore des années pour la terminer en la recouvrant de mosaïques.
Grandiose mais sans grande valeur artistique pour l'instant hormis ces belles coupoles.
Milica nous apprend que les prêtres orthodoxes
sont obligatoirement mariés et barbus. Tant qu'ils ne sont pas
mariés, ils sont seulement diacres et n'ont pas le droit de porter
la barbe. Par contre, les chefs hiérarchiques de l'Eglise – entre
autres le patriarche - sont élus parmi les moines qui, eux, restent
célibataires.
L'après-midi
est consacrée à la visite de Topola, la ville dont était
originaire la dernière dynastie royale des Karadjordjevic. Le
premier de la dynastie, un héros de la lutte contre les Ottomans, a
porté le nom de Karadjordje, Georges le Noir.
C'est
à Topola qu'a été construite dans les années 30 la crypte royale
dans laquelle on a d'abord transféré les restes de ce père
fondateur.
L'intérieur,
bien qu'assez récent, est recouvert de mosaïques de toute beauté
réalisées en Allemagne.
La
crypte souterraine regroupe les tombeaux de la famille royale.
Entre
autres celui d'Alexandre III assassiné à Marseille par un Croate avec notre compatriote béarnais Louis Barthou, alors ministre des
Affaires Etrangères. Un petit montage photo dans le musée qui se
trouve à proximité de la chapelle rappelle cette page sombre de
l'histoire yougoslave.
Et,
puisque nous sommes dans l'Histoire jusqu'au cou, voici le télégramme
qui annonça la déclaration de guerre de l'Autriche-Hongrie à la
Serbie, le 28 juillet 1914. Elle est écrite
en français, la langue diplomatique de l'époque.
«Le
gouvernement royal de Serbie n'ayant pas répondu d'une manière
satisfaisante à la note qui lui avait été remise par le ministre
d'Autriche-Hongrie à Belgrade à la date du 23 juillet 1914, le
gouvernement impérial et royal se trouve dans la nécessité de
pourvoir lui-même à la sauvegarde de ses droits et intérêts et de
recourir à cet effet à la force des armes. L'Autriche-Hongrie se
considère donc de ce moment en état de guerre avec la Serbie. Le
ministre des Affaires Etrangères d'Autriche-Hongrie , Comte
Berchtold». On en connait la
suite.
1 commentaire:
Je viens d'imprimer ... et de lire tes premiers reportages sur votre
croisière sur le Danube. L'Europe de l'est est en bien piètre état !
Les diplômés bulgares en costume "américain" ressemblent
beaucoup à la cérémonie de remise de diplôme à Lohan
à Berkeley en juin dernier avec le bonnet carré. Papi
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