dimanche 21 février 2016

Inde (10) : Nashik, Gymnastique matinale, tour de la vieille ville

Lever de bonne heure aujourd'hui parce que nous allons faire un peu de sport. Ashok qui entretient très régulièrement sa forme physique va courir tous les matins puis faire quelques brasses à la piscine avant de prendre son petit déjeuner et de rejoindre son bureau vers 10 heures. Un peu avant 8 heures, après une tasse de café ou de "thé indien", direction donc un petit parc où les joggers de Nashik se réunissent avant d'aller travailler. On peut courir mais aussi marcher plus ou moins rapidement sur une piste de 800 mètres autour du parc.
Beaucoup de femmes sont voilées, et pas seulement les musulmanes. Sur la piste du parc, la circulation pédestre est bien organisée, on est prié de marcher à gauche, ... comme les voitures dans la rue. On peut aussi utiliser des agrès, faire de la gymnastique en groupe avec un moniteur, s'entraîner au cricket ... 




Vers 9 heures, le parc est redevenu presque désert, tout le monde est reparti vers son travail ou sa maison.

C'est le moment auquel nous allons avec Ashok passer une petite heure à la piscine. Les femmes et les hommes ont chacun leur bassin. Ashok nous dit que si les hommes n'ont pas le droit d'aller dans le bassin couvert des femmes, par contre les femmes peuvent venir se baigner chez les hommes. Un zeste de sexisme se fait sentir. Ceci dit, au moment ou nous y étions, aucune femme ne s'est présentée dans le bassin des hommes ... 

Avant de faire quelques longueurs de bassin, je m'entraîne au maniement d'un gros gourdin dont les spécialistes comme Ashok se saisissent en le faisant tournoyer au dessus de leur tête et derrière leurs épaules. Qu'est-ce que c'est lourd, ce truc !

La piscine est très moyennement propre. Même si j'ai quelquefois vu pire ailleurs, l'Inde est tout de même assez sale. Un Indien qui s'approche de moi à la piscine pour parler en anglais en est bien conscient, puisqu'il me dit :"Que pensez-vous de l'Inde ? Ce n'est pas propre, non ?" Difficile de lui répondre très franchement, alors je lui dis que ça dépend des quartiers. C'est vrai que là où habitent Ashok et Vasanti, il n'y a pas de gravats et de tas d'ordures dans les rues … Par contre, à moins de 100 mètres, des SDF ont élu domicile au milieu des poubelles répandues sous l'autoroute ...
Régulièrement sur les murs on voit le dessin d'une une paire de lunettes. Ashok m'explique que c'est le symbole qui a été choisi par le Premier Ministre indien pour accompagner une campagne en faveur de la propreté : "A step forward for cleaning India" ("En avant pour nettoyer l'Inde"). Mais pourquoi alors avoir choisi une paire de lunettes? Renseignement pris, il s'agit des lunettes de Gandhi car ce dernier avait dit qu'il aimait que son pays soit propre, et parce qu'il balayait souvent lui-même devant sa maison pour donner l'exemple. 
On verra le résultat d'ici quelques mois, quelques années ou même quelques dizaines d'années … parce qu'il y a beaucoup à faire ! D'ici là, on peut dire comme à l'école : «En progrès, mais peut mieux faire !»
Après le petit déjeuner, Ashok nous emmène faire un tour de jour dans la vieille ville. Auparavant, comme j'ai besoin de changer des euros en roupies, nous allons à la banque. En fait, c'est plutôt la banque qui vient à nous! Ashok les a appelé au téléphone, et l'employé vient avec tous les papiers auprès de la voiture pour faire l'opération. Ashok me dit : "Comme je fais de bonnes affaires avec beaucoup d'entreprises, je suis connu et les employés viennent chez moi, à mon bureau ou à ma voiture, je ne vais jamais chez eux."

La voiture se fraie un chemin dans les petites rues du centre de la ville que nous avons vues hier, bordées de quelques belles maisons anciennes en bois. C'est impressionnant de pénétrer dans ce dédale de rues où motos et voitures déboulent rapidement au détour d'une maison. 




Il faut que le conducteur soit très vigilant avec ses yeux et ses oreilles, usant de tous ses sens! Mais la visite est plus qu'intéressante. D'abord la rivière sacrée Godavari où des femmes viennent se laver (toutes habillées) et laver leur linge.

Puis le Temple Kala Ram Mandir (de Rama noir) qui date de 1792. Ashok le promoteur est ébahi par la qualité de la construction. Nous, plus moyennement convaincus. Le temple a été construit à l'endroit où les Dieux Rama, Lakshmana et Sita habitaient à Parnakuti, pendant leur exil. La couleur des statues des Dieux réalisées en basalte noir a donné son nom au temple. Outre Rama, on y voit aussi représenté son serviteur, Hanuman, le Dieu-singe de la Puissance et du Courage.
Le spectacle des fidèles est par contre fascinant. Ici, une famille dont plusieurs membres ont la tête rasée - Ashok dit qu'ils viennent du Tamil Nadu, un État du Sud de l'Inde - 
là un grand père handicapé qui s'appuie sur sa fille, là encore un groupe de femmes vêtues de saris somptueux. On termine la visite par la grotte de Gumpha Panchivati creusée en profondeur sous le niveau du sol et où on révère, comme partout ici, Rama, son frère Lakshmana et sa femme Sita. La légende dit que c'est là que la Déesse Sita s'est cachée quand elle était attaquée par le méchant Ravana. Pour y accéder, il faut emprunter un escalier très étroit où nous pouvons à peine nous faufiler. Il faut dire que nous n'avons pas vraiment le format local! Mais nous sommes l'objet de tous les regards, étonnés ou amusés, toujours bienveillants.

Après le déjeuner, un sacré bruit de percussions se fait entendre non loin de la maison. On va voir ce qui se passe. Un grand arc en bois peint en rouge a été placé à l'entrée d'une rue voisine. Au sol, des décorations à la craie ont été faites sur le goudron. Un groupe de tambours s'en donne à cœur joie. Certains entrent presque en transe. 
L'orchestre s'approche d'une maison où de nombreuses femmes sont rassemblées. Quelqu'un qui parle un anglais approximatif nous assure qu'il s'agit d'un mariage. Des cuistots préparent un repas et plus loin, on a monté un petit chapiteau où les invités vont pouvoir danser.
Après son travail, Ashok nous fait faire un tour de la grande artère commerçante de la ville moderne. Son intérêt est bien moindre que celui des ruelles de la vieille ville. On y teste une des spécialités de Nashik, le kulfi, une délicieuse glace au lait de bufflonne.
Pour finir la journée, nous allons voir l'immense exposition de textiles de tous les États indiens. On peut y apprécier le grand talent de ces artisans. 


La fabrication textile a été de tout temps une spécialité de l'Inde. Certaines pièces réalisées à la main sont absolument exceptionnelles : qualité du tissage, motifs et couleurs. 



C'est chez un commerçant du Maharashtra que Michèle achète une belle pièce de soie pour s'en faire ensuite une robe, ou un sari.

Ce soir, repas aux saveurs de l'Inde du Sud : soupe de légumes au curry, et des petits gâteaux de riz avec un assaisonnement à base de coriandre, de menthe et de lait. «De vache» dit Vasanti avec un peu de regret, «parce que nous savons que les Occidentaux apprécient modérément le lait de bufflonne».

Aujourd'hui, Harshel, le fils d'Ashok et de Vasanti, est revenu à la maison après une mission de 2 jours à Mumbai. 
Il n'a pas fait d'études supérieures, juste le bac. Il travaille avec son père et il est responsable de projets de construction. Mais en ce moment, il travaille pour son propre compte. Il est en train de construire sa future brasserie-restaurant dans la banlieue de Nashik, non loin des vignobles de Sula. Il y travaille beaucoup, de 8 heures du matin à 11 heures du soir. Mais, dit-il, c'est pour son avenir parce qu'il espère gagner ensuite assez d'argent pour pouvoir vivre aisément quand il sera un peu plus agé ... d'autant qu'ici l'âge de la retraite vient d'être abaissé de 60 à 58 ans, contrairement à ce qui se passe chez nous. Harshel s'est marié avec Disha il y a un peu plus d'un an. Ashok et Vasanti nous montrent fièrement le magnifique album photos de cette fête qui a duré plusieurs jours, avec 3000 invités. Les costumes étaient superbes et changés deux fois par jour pour être adaptés à chaque rite particulier. Disha vient d'accoucher d'une petite fille appelée Akira qui sera leur seule fille naturelle. Harshel envisage en effet d'adopter un autre enfant parce, dit-il, il y a tant d'enfants orphelins ou abandonnés en Inde. Comme tous les jeunes Indiens, il vit avec son épouse et sa fille chez ses parents. Disha n'est pas à Nashik en ce moment. Elle est partie avec Akira chez sa propre mère dans le Gujarat pour une longue période de 2 à 3 mois. Harshel prend ça du bon côté. Est-ce habituel chez les Indiens ? Est-ce le signe que tout ne va pas pour le mieux dans le couple? Je me rappelle que Vasanti nous a avait dit à Pau que c'était un mariage arrangé et qu'elle avait choisi l'épouse de son fils. Tout concordait: l'âge, la situation sociale, l'horoscope. En attendant, Harshel dit qu'il voit Disha et Akira tous les jours sur son mobile, grâce aux réseaux sociaux. En Inde, dans les classes moyennes, on est branché … Beaucoup de gens sont accros de Facebook, Twitter ou Whatsapp !

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