Fin de notre séjour dans la capitale laotienne. On prend l'avion pour Paksé, la capitale de la Province de Champassak, au Sud-Laos. C'est le moment de quitter Yai et notre bon chauffeur qui nous ont accompagnés dans le Nord et à Vientiane. Si je regrettais Yai, on ne peut pas dire que ce serait pour ses qualités professionnelles de guide. Je dirais même que je n'ai jamais eu de guide aussi médiocre ! Nous mettons "passable" dans l'appréciation envoyée à l'agence, et je dois dire que c'est pour éviter de l'accabler.
1h15 de vol avec "Lao Airlines" et nous voici à Paksé. Notre nouveau guide, Phoukiao, est là à la sortie de l'aérogare. Par chance, il parle correctement français. Il a passé un an à Rennes il y a environ 10 ans pour apprendre notre langue . Il est aussi beaucoup plus calé que Yai et commence à nous parler de son pays sans que nous ayions besoin de lui poser beaucoup de question. C'est un guide, quoi ...
Après le déjeuner, nous partons pour le Plateau de Bolovens, à une altitude de 900 mètres environ, ce qui va nous prémunir des fortes chaleurs de la région (37° à Paksé cet après midi).
Sur la route du Plateau de Bolovens, on s'arrête à la grande cascade de Tadfane.
Comme nous allons dans une région habitée par des ethnies minoritaires ( les Khtus, les Alaks et les Laven) Phoukiao nous explique quelques unes de leurs coutumes. Les ethnies se distinguent par leurs langues plus que par leur origine raciale. Elles viennent pour beaucoup de Chine du Sud ou du Tibet. Leurs membres sont en général animistes, ils croient à l'existence des esprits qui peuvent être bienfaisants ou malfaisants. Dans les ethnies du Sud, on pratique ou plutôt on pratiquait la polygamie avant 1975. A l'époque actuelle, un homme ne peut avoir qu'une seule femme, même si, comme partout dans le monde, il peut la tromper ! La femme laotienne est fidèle dit notre guide, mais l'homme riche a des occasions ... Mais la tromperie doit rester secrète car sinon c'est ici immédiatement le divorce! On ne doit jamais perdre la face en Asie, toujours se souvenir de ça ... Les jeunes étudiants vivent maintenant souvent en concubinage (un effet de la mondialisation ... des mœurs) mais à la campagne on reste très traditionaliste. Chez les Khtus, on a une coutume pas banale. On met deux cercueils sous la maison en pilotis: un pour une femme, un pour un homme. On n'est jamais assez prudent !
Les villageois sont ici des producteurs de café qu'ils revendent à des entreprises qui le torréfient et l'expédient a l'étranger. Malongo fait partie des acheteurs de commerce équitable, c'est à dire qu'il garantit un prix minimum aux producteurs. Le producteur vend son café environ 5000 kips (50 cts d'euro) le kilo. Revendu sur le marché de Paksé, il vaut déjà 0,7 euro. Torréfié et conditionné il est alors vendu 5 euros le kilo sur le marché international. Malongo a aussi financé dans la région un centre de formation pour les planteurs. Je suis content de savoir que quand j'achète un café "commerce équitable du Laos" dans mon petit Intermarché de Billère cela fait un peu plus de revenu à ces pauvres gens que quand j'achète la marque de George Clooney ... Mais le prix payé au producteur représente tout de même encore une très faible part de ce que je paye, peut-être 2% au maximum ....
Le café du Laos est réputé un des meilleurs du monde, tant mieux. Dans les plantations, on trouve du robusta qui a été introduit par les Français et différentes sortes d'arabica qui ont été importées du Brésil depuis l'indépendance et qui donnent un café plus subtil.
Dans la région, on cultive et on produit aussi différentes sortes de thé : thé vert (le moins transformé), thé rouge, thé noir. La plus grande partie est exportée en Chine.
Malgré tout, le village habité par des Khtus et des Alaks dans lequel nous nous arrêtons est très pauvre. Les enfants ne sont pas tous habillés. Un petit garçon est occupé à remettre dans un sac les grains de café qui ont été étalés par terre pour être séchés. Je suppose qu'il fera l'opération inverse demain matin.
Les maisons misérables en bambou sont construites sur des pilotis sous lesquels se promènent poulets et cochons noirs.
Bien que l'entrée dans ce village soit payante, des enfants mendient, de même qu'une vieille femme qui nous donne une banane cuite et nous demande avec son sourire édenté "money, money" ... C'est la première fois - et dernière fois d'ailleurs - que nous voyons ça.
Une très jeune femme allaite son bébé sur la place.
Une jeune fille vend des billets de loterie en compagnie d'un vieil homme accroupi qui a l'air du "ravi" du village ....
C'est un peu la Cour des Miracles ici. Une grande place en tête battue sert de terrain de volley pour les jeunes qui ont l'air de bien s'amuser. Un peu à l'écart du village, un puits à pompe a été construit avec l'aide d'une organisation humanitaire européenne. On y voit les gens se laver. On pourrait se croire au Sahel ici.
Phoukiao nous dit que les enfants vont tous a l'école primaire. Elle est désormais gratuite et obligatoire. Cependant, comme chaque ethnie a sa propre langue - d'ailleurs uniquement orale - et ne parle pas le lao, il n'y a pas assez d'instituteurs capables de se faire comprendre des enfants de ces ethnies minoritaires (qui représentent 40% de la population laotienne cependant !). Il va falloir attendre quelque temps que des étudiants provenant de ces minorités soient formés dans les Écoles Normales du pays. Pour les retenir, le gouvernement a fortement réévalué leur salaire qui atteint environ 180 € par mois, un pactole ici surtout pour ceux qui vivent à la campagne !
Le Laos est un membre de l'Organisation de la Francophonie, même si très peu de gens connaissent notre langue (Nous avons d'ailleurs rencontré hier au marché de Vientiane un ancien ingénieur des Travaux Publics qui parlait très bien le français. Il avait fait ses études à Paris il y a 50 ans, se souvenait de la Guerre d'Algérie, et avait vécu 10 ans en France. Qu'est-ce qu'il était content de parler avec nous !) Alors, le gouvernement a décidé de donner un coup de pouce au français. Déjà les noms des ministères et offices administratifs sont écrits en lao et français. Pour faire plus, il fallait relancer l'apprentissage de notre langue à l'école, mais les professeurs de français avaient disparu ... Seuls les professeurs d'anglais sont assez nombreux. Qu'à cela ne tienne, les Écoles Normales sont en train de former des enseignants susceptibles de délivrer l'enseignement de base du français. Rendez-vous dans 20 ans ... si les priorités ne changent pas d'ici là ! Que de défis pour ces "hussards de la République laotienne" !
Le plateau de Bolovens est une région dont l'agriculture est bien développée. A part le café et le thé, on cultive aussi des bananes, des christophines (chouchous) sur des claies en hauteur. Les Chinois ont loué sur de longues périodes des terres agricoles et les Vietnamiens en on fait de même pour planter des hévéas et récolter du latex. Cela a créé quelques tensions avec les populations autochtones qui se plaignent de ne plus avoir assez de terres pour nourrir leurs familles....
Arrivée le soir a un lodge au bord de la magnifique cascade de Tad Lo. L'endroit est très beau; il serait féerique si les bungalows étaient en meilleur état et surtout si la cuisine n'était pas aussi déplorable... On ne peut pas tout avoir !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire