lundi 9 mars 2015

Traversée indochinoise (16) : La Fête du Vat Phu - Arrivée à Done Khong dans les 4000 Iles


Ce matin, gros problème. Michèle s'est aperçue hier au soir qu'elle avait oublié son téléphone portable au lodge de Tad Lo. C'est un beau smartphone, récent, mais le plus ennuyeux c'est que Michèle y a tous ses numéros de téléphone. Rançon du progrès ... Phoukiao appelle le lodge de Tad Lo sans succès. Nous envisageons toutes les possibilités. Retourner à Tad Lo mais il faut 1h30 pour aller et autant pour revenir à Paksé, d'où une perte de temps de 3 heures. Autre possibilité : Michèle va seule en taxi à Tad Lo et nous rejoint plus tard dans la journée. Hypothèse vite écartée parce qu'il n'y a pas de taxi a Paksé, uniquement des minibus, et en plus, personne ne parle le français par ici. Dernière solution : un groupe de touristes français part ce matin vers Tad Lo et un monsieur très sympathique se propose de récupérer là-bas le téléphone de Michèle et de nous le réexpédier quand il sera revenu en France. Il faut déjà savoir si le lodge de Tad Lo a retrouvé le téléphone. Notre guide a du mal à les joindre mais finalement au bout d'une demi heure, on lui dit qu'ils ne l'ont pas retrouvé. Sauf miracle, il est donc définitivement perdu ... Moins de chance que moi en Argentine où j'avais eu la chance extraordinaire de récupérer mon portable après qu'il ait glissé de ma poche !
Nous partons donc vers Champassak, un lieu habité il y a plus de 10 siècles par une ethnie d'origine chinoise, les Chams, de religion animiste. La civilisation Cham, a été balayée par l'expansion de l'Empire Khmer, de religion hindouiste. Ce sont des brahmanes venus du Cambodge qui ont alors construit dans ce lieu, un grand temple hindouiste. Plus tard, lors de la conversion de la région au bouddhisme, le temple hindouiste a été réutilisé par les bonzes. Le temple est devenu le Vat Phu, un des lieux de pèlerinage les plus importants du Laos. 
La grande fête annuelle aura lieu dans 2 jours, nous avons de la chance. Déjà aujourd'hui les fidèles se rassemblent nombreux sur l'esplanade située au pied du temple. Comme il y a du soleil, beaucoup sont réfugiés sous des ombrelles multicolores. 
Les femmes veulent garder la peau la plus claire possible, et les hommes les imitent.
Des dizaines de vendeurs ambulants proposent de habits, des ballons, et de la nourriture. A part les brochettes de poulet qui grillent un peu partout, on vend d'autres spécialités plus originales : des chenilles et grillons. Voilà une occasion de tester la gastronomie laotienne !
On goûte. Les grillons, c'est très mangeable. Même Michèle, Mado et Jean-Paul s'y risquent. Une fois retirées la carapace et les pattes, ça a même plutôt bon goût. 
Pour les chenilles de ver à soie, ce n'est pas pareil. Leur goût n'est pas si mauvais - bien qu'un peu amer - mais la consistance est franchement désagréable. Ça gicle sous la dent! Je teste aussi un œuf de cane couvé, c'est à dire ... avec un embryon de poussin de canard à l'intérieur. Là, il me faut prendre sur moi pour mâcher le poussin et l'avaler. Le goût n'est pas horrible, mais malgré tout, je dois réprimer une forte envie de vomir. Purement psychologique.

Nous allons grimper l'escalier aux marches inégales qui monte au sanctuaire. 
Un monde fou fait comme nous: des gens de toutes sortes, des bonzes, et de nombreux marchands du temple qui vendent boissons, grigris, offrandes a déposer dans le sanctuaire ou sur d'autres lieux saints se trouvant sur le parcours : statue du roi protecteur, pierre couchées représentant un couple d'amoureux (pour avoir de la chance en amour ou dans son couple). 
Des bonzesses tout en blanc vendent des amulettes et proposent de lier de petites cordelettes porte-bonheur aux poignets des fidèles. Tiens, voilà, je vais le faire ... On ne sait jamais ... Ces bonzesses aux crânes rasés sont très avenantes et nous regardent avec un bon sourire. Elles nous souhaitent "Bon voyage"  même si on n'achète rien du tout. 
D'autres jouent au dames par terre. 
Une fois arrivé tout en haut de l'escalier, on peut pénétrer dans le sanctuaire où trône un grand Bouddha a la tête de singe .... Les fidèles se pressent pour prier et faire brûler des cierges et de l'encens. Une odeur âcre et doucereuse qui pourrait faire tourner l'estomac de tout occidental normalement constitué. 
Un peu plus haut, c'est la source où on peut récolter l'eau lustrale qui porte bonheur. Une sorte d'eau de Lourdes bouddhiste ... Michèle en récolte une petite bouteille pour ses "petites Chinoises" : Sok Hoa, Sok Leng, ... 
Nous revoyons le même groupe de Laotiens accompagné par des bonzes qu'hier à Tad Lo. Ils nous font de grands signes de reconnaissance et rigolent très fort en nous apercevant ... 
Quelques images du temple khmer d'origine qui était en relation avec le grand temple d'Angkor au Cambodge
 Les dieux hindouistes Shiva et Parvati assis sur la monture Nandi
 La trilogie hindouiste : Shiva, Vishnou et Brahma
 Shiva

Après le déjeuner pris dans un restaurant au bord du Mékong (il fait plus d'un kilomètre de large ici), on prend la route, très bonne, vers le Sud, la région des 4000 Iles. Les voitures roulent beaucoup plus vite que d'ordinaire, et arrive ce qui devait arriver, un accident ... Un pauvre vieux qui devait rouler à moto est allongé à même la chaussée. Il a l'air mal en point. Il y a déjà un attroupement. On nous fait signe de passer notre chemin, il y a déjà assez de monde qui s'occupe de l'accidenté. Ici, pas de SAMU. Juste un dispensaire à quelques kilomètres qu'il faut rallier par les moyens du bord, et si c'est plus sérieux, il faut aller à Paksé, a plus de 100 kms de là ... Inutile de dire qu'il vaut mieux ne pas avoir un accident grave ou être très malade dans ce pays ... Nous ne nous rendons pas compte, la plupart du temps, de la chance que nous avons de vivre dans un pays développé comme le nôtre. Mauvais signe, on double un corbillard qui emmène un cadavre sur le lieu d'incinération.
L'île de Done Khong où nous couchons ce soir est une île située au milieu du Mékong. Depuis cette année, elle est reliée à la terre ferme par un pont en béton construit ... par les Chinois. Apparemment, dans ce pays, les Chinois construisent la plupart des infrastructures et les usines agro-alimentaires , les Thaïlandais quelques routes, des immeubles et des casinos, les Vietnamiens et les Chinois tiennent le commerce et beaucoup d'hôtels ... Je me demande ce qu'il reste aux Laotiens, à part les cultures traditionnelles de peu de rapport. 
Justement, au bord de la route, on vend du sucre de palme fabriqué à partir du jus de palmier à sucre qu'on fait chauffer dans des tiges de bambou. Voilà une production typiquement laotienne ...
C'est dans une échoppe qui vend du sucre le long de la route que nous rencontrons un couple de Laotiens qui parle parfaitement le français. Lui est pédiatre, a fait ses études de médecine à Lille et elle a vécu longtemps dans la banlieue parisienne. Phoukiao nous explique que les étudiants boursiers qui ont été choisis pour étudier à l'étranger reviennent souvent avec un poste de fonctionnaire (sans doute pour rembourser l'Etat qui leur a payé une partie de leurs études). C'est probablement le cas de ce médecin qui a vécu souvent à l'étranger, au Cambodge et au Vietnam. Le médecin nous donne sa recette pour manger le fruit de la noix de palme qui semble appétissante : il mélange le fruit - très juteux - avec l'eau de palme coupée d'un peu de citron. Sans doute plus goûteux que le seul fruit de la noix de palme, qui est très fade.
Depuis l'hôtel qui se trouve au bord du Mékong, on a une vue splendide sur le fleuve et on peut apercevoir de nombreux pêcheurs à l'épervier qui lancent leur filet sans se presser.


Des petits moines qui attendent de se laver dans le Mékong observent le spectacle tranquillement depuis la rive. 
Le soleil se couche et arrive l'heure bleue. Spectacle inoubliable. 
Avec les yeux de Michèle



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