Après ces 2 jours de visites intenses à Saint-Pétersbourg, nous avons adopté le rythme «croisière». Le matin, la radio du bord diffuse doucement dans notre cabine une petite musique, puis viennent les commentaires sur l'itinéraire du jour : aujourd'hui la Neva, le Lac Ladoga, le plus grand d'Europe, et la Rivière Svir au bord de laquelle nous ferons une halte cet après-midi.
Après un petit déjeuner-buffet copieux, plusieurs programmes attendent les croisiéristes : gym du matin,
apprentissage de la langue, des chants et des danses russes, conférences sur l'histoire, la religion et la vie quotidienne. Je préfère quant à moi profiter du calme de ces quelques jours pour lire les Nouvelles de Pétersbourg de Gogol, un recueil de petites histoires fantastiques qui ont pour cadre la capitale de l'Empire Russe. Je n'avais jamais lu Gogol avant cela, et ça me plait. L'absurdité des situations, les personnages sans défense qui sont humiliés, la description de l'univers bureaucratique où règne le mensonge me rappellent les romans de Kafka, la Métamorphose et le Procès.
Mais voici que se présente notre première écluse. Nous en traverserons 16 avant d'arriver à Moscou.
Outre les 200 bateaux de croisière, la voie d'eau est empruntée par quelques bateaux de particuliers,
et surtout par une myriade de petits pétroliers et chimiquiers de la Volgo-Neft
Curieusement, lors du franchissement des écluses, les bateaux de croisière ont la priorité sur le trafic commercial … Les capitaines des compagnies industrielles doivent nous détester !
Nous arrivons en début d'après-midi à Mandrogi, «village russe» reconstitué, avec ses isbas, les chalets des Russes :
Le village est entouré de pins et de bouleaux :
Des artisans pétersbourgeois viennent y montrer leurs talents et vendre, à bon prix, leurs productions : petits oeufs, tissages, objets en bois de bouleau, petites poupées, matriochkas
Goûter avec toutes les déclinaisons d'airelles (ou canneberges) : en confiture sur les gateaux, en jus de fruit, en liqueur. C'est aussi l'occasion de goûter le thé préparé à la russe : l'eau bouillante sort du samovar dont la partie centrale contient du charbon destiné à chauffer l'eau.
Pendant ce temps là, une chanteuse à la voix forte nous interprète les classiques du répertoire populaire russe (Калинка, Soirs de Moscou, ...), accompagnée des 2 instruments indispensables : l'accordéon et la balalaïka.
Au moment de remonter sur notre bateau, ce sont les mêmes airs, et beaucoup d'autres encore, qu'interprète un petit pépé à l'accordéon. Ses compagnes de voyage, touristes russes en goguette, en profitent pour esquisser, tout en riant, quelques pas de danse sous les arbres. Les Russes adorent jouer de la musique, chanter et danser !
Notre croisière reprend son cours tranquille sur la Rivière Svir, bordée par de petites isbas multicolores
et des usines désaffectées à la suite de la faillite économique des années 1990.
En Russie et en Mongolie aussi d'ailleurs, nous apercevrons des dizaines d'usines désaffectées au milieu de vastes friches industrielles, dans les banlieues des grandes villes comme en rase campagne. C'est vraiment là qu'on touche du doigt l'ampleur de la crise économique qui a accompagné la fin de l'Union Soviétique et les débuts de l'ère libérale (fin de l'ère Gorbatchev, début de l'ère Eltsine). Le passage s'est fait brutalement : privatisation «à la hache», les usines les plus rentables étant accaparées par les oligarches (d'anciens apparatchiks communistes), les moins rentables étant abandonnées sans autre forme de procès, et sans compensation aucune pour leurs anciens employés. Aux dires de plusieurs personnes avec lesquels nous en avons parlé, les citadins et les retraités russes n'ayant plus les revenus pour s'acheter à manger n'ont alors dû leur survie qu'en stockant leurs propres patates et leurs légumes cultivés dans leurs datchas, ces petites maisons en bois à la campagne que le régime communiste leur avait alloué. Les datchas proclamées héroïnes de la libéralisation …
Gorbatchev, à tort ou à raison, est associé par les Russes à cette triste période faite d'accroissement massive et rapide de la pauvreté, d'anarchie législative et de perte des repères, de confiscation des richesses par une petite poignée de profiteurs. C'était aussi la fin de l'Empire, le temps où les gens avaient honte d'être Russes. En contrepoint, c'est exactement pour les raisons inverses que Vladimir Poutine est maintenant l'homme fort qu'on connaît.
Passage d'une nouvelle écluse en fin de soirée.
Après un petit déjeuner-buffet copieux, plusieurs programmes attendent les croisiéristes : gym du matin,
apprentissage de la langue, des chants et des danses russes, conférences sur l'histoire, la religion et la vie quotidienne. Je préfère quant à moi profiter du calme de ces quelques jours pour lire les Nouvelles de Pétersbourg de Gogol, un recueil de petites histoires fantastiques qui ont pour cadre la capitale de l'Empire Russe. Je n'avais jamais lu Gogol avant cela, et ça me plait. L'absurdité des situations, les personnages sans défense qui sont humiliés, la description de l'univers bureaucratique où règne le mensonge me rappellent les romans de Kafka, la Métamorphose et le Procès.
Mais voici que se présente notre première écluse. Nous en traverserons 16 avant d'arriver à Moscou.
Outre les 200 bateaux de croisière, la voie d'eau est empruntée par quelques bateaux de particuliers,
et surtout par une myriade de petits pétroliers et chimiquiers de la Volgo-Neft
Curieusement, lors du franchissement des écluses, les bateaux de croisière ont la priorité sur le trafic commercial … Les capitaines des compagnies industrielles doivent nous détester !
Nous arrivons en début d'après-midi à Mandrogi, «village russe» reconstitué, avec ses isbas, les chalets des Russes :
Le village est entouré de pins et de bouleaux :
Des artisans pétersbourgeois viennent y montrer leurs talents et vendre, à bon prix, leurs productions : petits oeufs, tissages, objets en bois de bouleau, petites poupées, matriochkas
Goûter avec toutes les déclinaisons d'airelles (ou canneberges) : en confiture sur les gateaux, en jus de fruit, en liqueur. C'est aussi l'occasion de goûter le thé préparé à la russe : l'eau bouillante sort du samovar dont la partie centrale contient du charbon destiné à chauffer l'eau.
Pendant ce temps là, une chanteuse à la voix forte nous interprète les classiques du répertoire populaire russe (Калинка, Soirs de Moscou, ...), accompagnée des 2 instruments indispensables : l'accordéon et la balalaïka.
Au moment de remonter sur notre bateau, ce sont les mêmes airs, et beaucoup d'autres encore, qu'interprète un petit pépé à l'accordéon. Ses compagnes de voyage, touristes russes en goguette, en profitent pour esquisser, tout en riant, quelques pas de danse sous les arbres. Les Russes adorent jouer de la musique, chanter et danser !
Notre croisière reprend son cours tranquille sur la Rivière Svir, bordée par de petites isbas multicolores
et des usines désaffectées à la suite de la faillite économique des années 1990.
En Russie et en Mongolie aussi d'ailleurs, nous apercevrons des dizaines d'usines désaffectées au milieu de vastes friches industrielles, dans les banlieues des grandes villes comme en rase campagne. C'est vraiment là qu'on touche du doigt l'ampleur de la crise économique qui a accompagné la fin de l'Union Soviétique et les débuts de l'ère libérale (fin de l'ère Gorbatchev, début de l'ère Eltsine). Le passage s'est fait brutalement : privatisation «à la hache», les usines les plus rentables étant accaparées par les oligarches (d'anciens apparatchiks communistes), les moins rentables étant abandonnées sans autre forme de procès, et sans compensation aucune pour leurs anciens employés. Aux dires de plusieurs personnes avec lesquels nous en avons parlé, les citadins et les retraités russes n'ayant plus les revenus pour s'acheter à manger n'ont alors dû leur survie qu'en stockant leurs propres patates et leurs légumes cultivés dans leurs datchas, ces petites maisons en bois à la campagne que le régime communiste leur avait alloué. Les datchas proclamées héroïnes de la libéralisation …
Gorbatchev, à tort ou à raison, est associé par les Russes à cette triste période faite d'accroissement massive et rapide de la pauvreté, d'anarchie législative et de perte des repères, de confiscation des richesses par une petite poignée de profiteurs. C'était aussi la fin de l'Empire, le temps où les gens avaient honte d'être Russes. En contrepoint, c'est exactement pour les raisons inverses que Vladimir Poutine est maintenant l'homme fort qu'on connaît.
Passage d'une nouvelle écluse en fin de soirée.
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