Michèle va bien ce matin. Alors, nous partons très tôt en bus de Belize City pour une journée consacrée aux temples de Lamanai. Comme nous ne savons pas très précisément où se
trouve le terminal des bus, nous prenons d'abord un taxi vers ce terminal. Le
taxi traverse une banlieue pauvre, avec des maisons en bois sur lesquelles sont
taggés des slogans en faveur de l'UDP, le parti de centre-droit au pouvoir depuis 2008.
A peine 2 kilomètres à faire, 5 minutes et 5 dollars US dépensés. C'est bien payé mais il est 6h20 quand nous quittons l'hôtel et nous
n'avons pas vraiment le choix ... Du coup, au terminal des bus, nous pouvons prendre
celui qui part à 7h vers Orange Walk et la frontière mexicaine et qui nous arrêtera
au toll bridge, le pont à péage d'où se fait le départ en bateau vers Lamanai.
Au terminal des bus, on trouve de petites échoppes qui vendent de quoi manger, toutes tenues par des musulmans qui s'appellent Ali quelque chose. Il y a en effet dans ce pays très chrétien une petite communauté libanaise.
90 kms de bus - type bus de ramassage scolaire américain - où nous ne sommes pas
plus de 20 pèlerins.
A côté de nous, une bélizienne est plongée dans la lecture de Faith and Acceptance, "Foi et acceptation". Tout un
programme ... adapté à un pays où il faudrait sans doute éviter de tout accepter
sans broncher ... Les évangélistes sont passés par là !
Plusieurs panneaux affichés au bord de la route font penser
qu'a lieu en ce moment une bataille politique autour de l'abrogation, ou pas, de
la loi sur l'avortement: un panneau contre l'abrogation Abortion is there
forever ("L'avortement c'est pour toujours"), et d'autres pour l'abrogation One abortion, one dead, one wounded ("Un avortement, un mort, une traumatisée")
ou bien Struggle for Life ("Battez-vous pour la Vie"). Partout dans
le monde, les Eglises combattent les droits des femmes.
Plus tard, nous croiserons le chemin d'une ferme exploitée
par des Mennonites, une secte protestante anabaptiste proche des Amish. Les hommes et les
garçons portent des chapeaux, et les femmes sont habillées à l'ancienne avec
grand chapeau et robes longues.
Ces Mennonites-là se sont installés au Belize assez récemment. Ils viennent du Mexique où ils étaient paraît-il persécutés car ils refusent de faire le service militaire. Cette secte a pris naissance en Suisse au XVIème Siècle et elle a ensuite émigré en Allemagne, aux Pays-Bas, en Amérique. Les Amish américains ont les mêmes racines religieuses. Les Mennonites ne se mélangent pas aux autres confessions et continuent de parler leur dialecte bas-allemand depuis des siècles. Les femmes sont totalement soumises à leur mari, ne parlent pas devant eux. Le guide nous dit que 90% d'entre elles ne parlent ni anglais, ni espagnol, ni créole, les langues du Belize. Les Mennonites se déplacent en carriole tirée par des chevaux. Certaines communautés n'ont pour seule source d'énergie que l'électricité produite occasionnellement par un générateur tournant grâce à des mules ou bien grâce au vent ...
Ces Mennonites-là se sont installés au Belize assez récemment. Ils viennent du Mexique où ils étaient paraît-il persécutés car ils refusent de faire le service militaire. Cette secte a pris naissance en Suisse au XVIème Siècle et elle a ensuite émigré en Allemagne, aux Pays-Bas, en Amérique. Les Amish américains ont les mêmes racines religieuses. Les Mennonites ne se mélangent pas aux autres confessions et continuent de parler leur dialecte bas-allemand depuis des siècles. Les femmes sont totalement soumises à leur mari, ne parlent pas devant eux. Le guide nous dit que 90% d'entre elles ne parlent ni anglais, ni espagnol, ni créole, les langues du Belize. Les Mennonites se déplacent en carriole tirée par des chevaux. Certaines communautés n'ont pour seule source d'énergie que l'électricité produite occasionnellement par un générateur tournant grâce à des mules ou bien grâce au vent ...
Pourtant, d'autres Mennonites font
marcher le commerce bélizien. Il posséderaient des concessions automobiles et des magasins de pneus. Apparemment, ceux-là acceptent le confort moderne, mais
pour les autres seulement! Comme ils sont travailleurs et entreprenants - un
peu comme les Mormons aux USA - ils représenteraient 60% du PIB belizien, nous dit une Hollandaise qui
est du voyage avec nous et dont le mari travaille pour le compte de la Société des
Télécoms du Belize ... A voir. Elle nous explique que les béliziens qui travaillent avec son mari sont très serviables et gentils mais pas très efficaces. Très cool quoi ! Certains commerces comme la restauration
sont tenus par des Hindous et surtout des Chinois, descendants des coolies que les
Britanniques ont fait venir ici au XIXeme Siècle après l'abandon de l'esclavage.
Nous sommes arrivés très tôt au toll bridge, et nous devons attendre que d'autres clients complètent le bateau d'une vingtaine de passagers qui nous emmènera à Lamanai, à 30 kilomètres de là.
On y charge aussi la nourriture du déjeuner, et en avant pour l'aventure! C'est
une voyage à la Indiana Jones que nous entreprenons, à la découverte des
temples mayas cachés dans la jungle. Le bateau glisse sur l'eau des multiples
branches d'un large fleuve infestées, parait-il, par de beaux crocodiles.
Les rives sont bordées de grands arbres qui
puisent leurs racines directement dans l'eau.
Beaucoup d'oiseaux, de grandes
aigrettes, des hérons de différents types, des martins-pêcheurs, des rapaces,
des jacanas qui marchent sur l'eau, ...
Un héron vert
Une grande égrette
Un balbuzard pêcheur
Un jacana, aussi appelé oiseau Jésus-Christ, parce qu'il marche sur l'eau (en fait sur les nénuphars)
Et aussi des tortues d'eau
Notre guide nous parle des Mayas. Cette civilisation indienne
millénaire d'Amérique Centrale a été très puissante et bien développée. Ils
étaient passés maîtres en mathématiques - comme les Chinois et les Indiens, ils
connaissaient le 0 bien avant les Occidentaux - et en astronomie. Le nom de
Mayas leur a été donné par les conquérants espagnols parce qu'ils cultivaient
le maïs (maize en espagnol). Contrairement à ce qu'attendaient et croyaient au départ les
Espagnols, les Mayas ne vénéraient pas l'or comme les Incas. La mesure de
leur richesse se faisait en ... chocolat, la boisson sacrée de leurs dieux. Le
terme chocolat a été donné par les Espagnols parce qu'à leur rencontre, les
Mayas leur offraient la boisson sacrée mélangée avec du piment et du miel en
disant xoco atl (boisson épicée) ... Je ne sais pas si c'est vrai, mais c'est
bien trouvé! Le jade était un autre signe de richesse et les tombeaux de leurs
rois contenaient très souvent des bijoux et des ornements en jade verte.
La société maya comportait deux groupes sociaux bien distincts, l'élite et
le bas peuple. Les membres de l'élite étaient des demi-dieux que les dieux avaient
engendrés par mélange de leur propre sang et de maïs jaune et blanc. C'est du
moins ce que les élites enseignaient aux autres qui étaient en fait des sous-hommes
sans autre droit que de trimer pour l'aristocratie ... Mais, les privilèges de
l'élite avaient aussi leurs contreparties moins agréables, comme celle de faire la guerre - interdite aux
moins que rien - et celle d'être tués lorsqu'il y avait des sacrifices
humains. Seuls les membres de l'aristocratie pouvaient être sacrifiés aux dieux
car ils étaient les seuls à posséder le sang divin dans leurs veines. Tout allait donc pour le
mieux dans le meilleur des mondes mayas jusqu'à ce qu'arrivent les famines. Les Mayas avaient au fil du temps tellement déforesté pour pouvoir cultiver le maïs sacré et pour
couper du bois servant à faire chauffer les pierres pour en extraire du ciment
pour leurs lieux de cultes que le climat changea, causant une diminution des récoltes agricoles puis la famine. Le petit peuple se révolta alors contre les élites incapables de lui assurer une certaine prospérité, des guerres fratricides se firent jour entre les cités, et finalement la grande civilisation maya "classique" s'effondra vers l'an 1000. Quand les Espagnols
débarquèrent au XVIeme Siècle, la civilisation maya avait disparu depuis longtemps, victime de son extrémisme religieux et du peu de considération qu'elle avait eu pour la Terre-Mère. Restaient de
multiples communautés qui parlaient chacune un dialecte différent. Une histoire
qui fait un peu penser à celle de notre monde moderne ...
Le guide tord aussi le cou à une affirmation répandue il y a
quelques années affirmant que les Mayas, comme Nostradamus, avaient prédit la fin
du monde pour 2012. ... D'après lui, 2012 ne serait pas la fin du monde selon
le calendrier maya, mais la fin d'un cycle de 52 000 ans. Nous serions passés cette année-là du monde de la lenteur à un monde caractérisé par la rapidité, l'activisme.
D'ailleurs, nous dit note guide, n'avez vous pas remarqué que les jeunes sont
maintenant accros aux nouvelles technologies où tout va si vite ...
Effectivement, vu comme ça, les Mayas avaient raison !
Stèle du calendrier maya
Arrivés sur les lieux des temples de Lamanai, nous ne sommes
pas seuls. Notre guide nous dit qu'un bateau de croisière a déversé sur le site
ses passagers par dizaines. On accélère le pas pour se retrouver un peu moins bousculés sur les temples. Il y en aurait 800 mais moins de 10 ont été mis au jour. C'est
qu'ici le climat et la végétation tropicale ont tôt fait de vous détruire les
plus beaux monuments. Pourtant ces pyramides à degré sont grandioses, et qui
plus est, chacun chef construisait sa pyramide par dessus les anciennes, en les ensevelissant. Dans
certains temples, il y a jusqu'à 5 couches superposées. Il a fallu 5 ans de
travaux pour déblayer les 3 grands pyramides qu'on peut visiter maintenant ...
Arrivés à leur pied, on est impressionné devant le travail
accompli par la basse caste pour construire de tels édifices. Il y en a deux sortes, les tombes des rois, et les temples dédiés aux dieux, entre autres le Dieu de l'Arc-en-ciel et le Dieu-Soleil.
Lamanai a été occupée de façon continue jusqu'au début de l'époque coloniale espagnole. Sa situation au bord du lagon de la New River en a fait un important centre d'échanges commerciaux avec le Mexique et l'Amérique Centrale. C'est un des rares sites mayas de la région à avoir survécu à l'effondrement de la civilisation maya au XIème Siècle.
Lamanai a été occupée de façon continue jusqu'au début de l'époque coloniale espagnole. Sa situation au bord du lagon de la New River en a fait un important centre d'échanges commerciaux avec le Mexique et l'Amérique Centrale. C'est un des rares sites mayas de la région à avoir survécu à l'effondrement de la civilisation maya au XIème Siècle.
Le Temple du Masque dont la construction a commencé en 200 av JC. Il a été recouvert ultérieurement par plusieurs constructions jusqu'en 1300. A sa base, deux masques d'hommes qui datent de 400 environ.
Un des masques qui figure parmi les plus beaux masques mayas. Il est entouré d'un habit en forme de tête de crocodile. Lamanai signifie en maya "Crocodile submergé"
Le Grand Temple dont le sommet s'élève à 38 mètres au dessus de la canopée. Sa construction a commencé vers 100 av JC.
Du sommet on a une belle vue sur le New River Lagoon
Le Temple du Jaguar date du VIème Siècle environ et a été modifié jusqu'au XVème Siècle.
A sa base, deux têtes de jaguars stylisées
Selon leur religion, tous les Mayas, de haute ou basse extraction, allaient en enfer après leur mort, mais, par chance, l'aristocratie avait un ticket de sortie
pour rejoindre directement le paradis où il y avait 13 niveaux de bonheur.
Mieux que chez les islamistes! Quant aux autres, le sort de leur âme dépendait
de ce qu'ils avaient fait durant leur vie, et surtout s'ils avaient obéi à la
caste dirigeante et bien payé leurs impôts. Si c'était le cas, leur âme pouvait
elle-aussi rejoindre le paradis. Ceux qui n'avaient pas fait de bonnes choses,
pouvaient déguster les affres des 9 niveaux d'enfer, celui où on vous broie les
os, celui où vous retrouvez dans le feu ou la glace, celui du suicide ou bien
encore celui où on vomit du sang ... Et en plus, pour couronner le tout, ils étaient réincarnés en rats. N'en jetez plus, la coupe est pleine ... On comprend pourquoi il valait mieux
obéir aux puissants ...
Les membres de l'élite étaient reconnaissables à leurs effets:
bijoux d'oreille, colliers de jade. Ils avaient aussi les dents taillées et
limées, dans lesquelles on leur incrustait des bijoux de jade. Eux seuls
avaient le droit d'ingurgiter la boisson sacrée, le chocolat. Ils pratiquaient
un jeu de balle qui combinait les règles actuelles du basketball et du
volley-ball.
Le terrain de jeu (Ball Court)
Le quartier d'habitation de l'élite
Très intéressante visite. Aux abords du site, des singes
hurleurs sont en train de se gaver de fruits. De temps en temps, on les entend
faire d'énormes "woo, woo". Si on ne savait pas qu'il s'agit d'eux,
on pourrait être impressionné car leurs grognements ressemblent au grognement
d'un tigre ! Enfin ici ce serait plutôt un jaguar ...
Quelques belles fleurs tropicales.
Il y a encore de beaux oiseaux au bord de la grande lagune
qui sert de décor naturel aux temples mayas de Lamanai.
Aigrette bleue
Et même un coati, une sorte
de grand raton-laveur au nez pointu.
Quant aux plantes grasses, certains cactus s'enroulent
littéralement autour des branches des arbres tant et si bien qu'on dirait des
boas. C'est vraiment le pays d'Indiana Jones ici.
Pour revenir à Belize City, la Néerlandaise avec laquelle
nous avons sympathisé nous propose de nous ramener avec la voiture de fonction
de son mari. Ce sera plus agréable que le bus de ligne aux
fauteuils défoncés. Ça nous permet aussi d'échanger nos impressions sur la vie
à Belize, sur les voyages. Elle vient de prendre sa retraite, elle était
infirmière en psychiatrie et apprécie le calme que lui procure une retraite
bien méritée, après 42 ans de bons et loyaux services. Maintenant, elle et son mari
envisagent de passer 3 à 4 mois en Amérique Latine, comme nous. Arrivés dans la ville,
nous lui offrons une bière pour finir la journée.
Ce soir, comme nous avons pas mal dépensé - 25 dollars US de
transport, et 80 dollars US de bateau et visite à Lamanai - nous allons tester les baraques de fast food bélizien où on vend des hamburgers et des tacos : 4 dollars US le burger, 1 dollar US le taco. Plus une glace chez le Chinois pour 10 dollars US.
En attendant qu'on nous prépare nos en-cas, nous sommes
littéralement assiégés par de pauvres hères qui nous montrent leurs infirmités,
qui nous disent avoir faim, et nous réclament un peu d'argent. Difficile de
dire non, mais quand on a donné, il y en a d'autres qui s'approchent, ayant vu
le porte-monnaie et qui demandent à leur tour "pourquoi pas moi ?" C'est une situation très
désagréable que nous n'avons finalement rencontrée que très peu de fois lors de nos
voyages. Il y avait bien des mendiants mais des gens en situation d'extrême
pauvreté qui approchent là ou nous commandons à manger, c'est très difficile à
supporter. En les voyant, on a finalement un peu honte d'avoir tant d'argent,
et eux si peu. C'est ici qu'on devrait construire des Banques Alimentaires! La misère de nos pays développés serait sans doute considérée comme une
certaine richesse à ces pauvres bougres. Ne parlons même pas de nos milliardaires! On est toujours le riche de quelqu'un de plus pauvre que soi, On est toujours le pauvre de quelqu'un de plus riche que soi, c'est selon. Pourtant, ici à Belize, il y aussi des gens qui gagnent plutôt bien leur vie
puisque le nombre de 4x4 est loin d'être négligeable par exemple. Et une partie
de la banlieue que nous avons traversée avec notre amie néerlandaise est
constituée de maisons plutôt agréables et en bon état. Maintenant je suis sûr
que notre taxi qui nous a ramené de l'aéroport et transporté hier vers Altun Ha en
nous soulageant de 80 dollars US a légèrement abusé de nous ...
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