mardi 23 février 2016

Inde (13) : Nashik, Un petit déjeuner marathi traditionnel, le chantier de Harshel

Ce matin, nous sommes invités chez un ami de Ashok, promoteur comme lui, avec lequel il travaille quelquefois en association. Ce dernier est en train de finir de construire sa magnifique résidence secondaire à une vingtaine de kilomètres de Nashik. Elle n'est pas totalement terminée mais on voit déjà que ce sera une résidence 4 étoiles. Sol en granit et en marbre, boiseries en arbres tropicaux, éclairages ultra-modernes, immense piscine entourée de massifs de fleurs, avec un petit bassin pour les enfants en bas âge, verger de plusieurs dizaines d'arbres (manguiers, bananiers, papayers, figuiers, ... ), arbres de décoration, ... 
A proximité de la résidence, on trouve une immense salle à laquelle est adjointe une cuisine et qui est prête à accueillir de grandes fêtes : fiançailles, mariages, naissances, anniversaires, ...Mais ce qui est le plus étonnant c'est la reconstitution d'une petite maison de paysans du Maharashtra. Autour de cette case, le sol est fabriqué avec de la boue et de la bouse de vache mélangées et séchées.
Les propriétaires ont amassé tous les ustensiles traditionnels pour la cuisine et il y a un feu de bois sur lequel une domestique fait cuire toutes sortes de pains indiens. 
 La maîtresse de maison met la main à la pâte ainsi que sa belle-fille qui parle un anglais parfait. 
Cette dernière qui est charmante nous donne toutes les explications sur la vie d'autrefois à la campagne dans cette province. Par contre, on voit à leur anglais très rudimentaire que les propriétaires - les parents - sont originaires de milieux populaires de la région. Ils veulent certainement maintenir les traditions locales en les faisant partager à leurs amis. Leur attitude est faite de nostalgie du temps passé mais aussi celle de gens qui se sont enrichis et qui veulent montrer leur réussite sociale. Quoiqu'il en soit, ils sont extrêmement sympathiques et accueillants. On aimerait qu'il en soit de même dans notre pays! 
Les femmes se relaient pour préparer tous les ingrédients d'un bon petit déjeuner traditionnel. 
Le lait sort directement du pis de la vache (moi ça me rappelle des souvenirs de chez ma grand-mère, je détestais boire le lait recouvert de peau, tiède et gras, sortant du pis). Le "beurre indien" - aussi appelé "beurre clarifié" ou ghee - est baratté ici même. On nous prépare un mélange de céréales, des oeufs brouillés, des pains qu'on tartine avec du beurre indien et une sorte de confiture épicée, du yaourt fait maison (je n'en ai jamais mangé d'aussi gras). On se régale au beau milieu du jardin, assis sur des sièges traditionnels ... L'impression d'être invités chez le Bouyghes local !
Arrivent Harshel, le fils de Ashok et Vasanti, accompagné du fils de la maison. Comparés à leurs pères qui ont dû travailler dur pour réussir et qui sont très discrets, ces deux-là, pourtant très gentils et drôles, détonnent. Avec leurs  habits à la mode, leurs Raybans dans les cheveux, leurs chaussures à bouts pointus, leur maîtrise parfaite de l'anglais, leur faconde, ce sont apparemment de gentils "fils à papa" qui pourraient jouer dans "La vérité si je mens" ! Sauront-ils faire fructifier les entreprises familiales?
Avant de partir, on nous offre encore des cadeaux: du tissu pour fabriquer un haut pour Michèle (un peu plus tard dans la journée un tailleur se présentera chez Ashok et Vasanti pour prendre ses mesures et lui remettre le lendemain un haut dûment réalisé à sa taille), un châle pour se protéger du froid pour moi. Tout ceci est absolument incroyable. Ces gens ne nous connaissaient pas la semaine dernière ... Quelle gentillesse ! 
On fait la photo souvenir qui sera partagée le jour même sur les comptes Facebook des membres du Lions Club de Nashik Corporate
Retour à la maison. Il est temps de préparer le dîner français que nous servirons ce soir : omelette piperade, gratin dauphinois et tarte aux pommes. Quand je commence à couper les pommes de terre, je sens que la domestique d'Ashok et Vasanti est très étonnée. Elle me propose plusieurs fois de faire le travail elle-même. Je pense qu'elle n'a jamais vu un homme mettre la main à la pâte ... 
Le déjeuner, compte tenu de ce que nous avons mangé ce matin, est sommaire: un peu de riz. Et l'après-midi très calme. Michèle en profite pour peindre
et parler avec Vasanti. Avant de s'arrêter de travailler, cette dernière a été institutrice pendant 27 ans. Elle touche maintenant une retraite de 120 euros par mois et elle est très étonnée d'apprendre le montant de la retraite de Michèle ... C'est beaucoup d'argent pour elle. Ca donne une petite idée de la différence de revenus entre les 2 pays ! Evidemment, il faut prendre en compte le coût de la vie ici. La nourriture est très bon marché ici ; par exemple, un kilo de tomates coûte moins de 10 roupies, c'est à dire 0,15 €. Mais, pour l'essence, elle coûte environ 0,6 € le litre, plus de la moitié de ce qu'elle coûte chez nous. C'est aussi le rapport de prix qui existe pour acheter une voiture ... Pour un Indien sans qualification, qui gagne moins de 100 € par mois, c'est totalement au dessus de ses possibilités !
Avec Ashok, nous partons à la banque, le moyen me dit-il de découvrir un nouveau quartier ... Mais de banque et de banquier, point!  Harshel appelle son père au téléphone car il a un problème sur son chantier. C'est ainsi que je me retrouve au beau milieu d'un enclos où évoluent une pelle mécanique et des tracteurs qui évacuent des quantités énormes de terre. 
Apparemment, le chantier qui vient de commencer à déjà pris du retard et on demande conseil à Ashok qui est un homme expérimenté. Harshel est associé avec 4 autres jeunes adultes (dont le fils du constructeur de ce matin) pour construire un restaurant-brasserie. Ils font cela sur leurs propres deniers. Le coût de la construction hors matériels d'ameublement est d'environ 400 000 euros, ce qui représente une somme rondelette en Inde. Ensuite, lorsque tout sera fini - en août espèrent-ils - les 5 seront les gérants de l'établissement. Je comprends maintenant mieux la remarque de Harshel qui disait qu'il travaillait pour son futur. En attendant, la construction d'une immense citerne pour la partie brasserie de l'établissement pose problème et Ashok est venu donner des conseils, les jeunes n'ayant pas trop d'idées sur la façon de procéder ... Leur détachement à l'égard des ouvriers du chantier me fait penser qu'ils ne sont pas au bout leurs peines ! Mais Harshel est optimiste. Il me dit "La prochaine fois que vous viendrez à Nashik (peut-être cet été ?), vous viendrez boire une bonne bière chez moi !".
Pour le dîner, nous avons un invité, un autre ami de Ashok, constructeur lui aussi, qui était aussi ce matin au petit déjeuner. Tout le monde apprécie notre cuisine, surtout le gratin dauphinois, sauf notre invité surprise qui éprouve le besoin de rajouter des piments forts. On ne se refait pas !


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