dimanche 8 août 2010

De Saint-Pétersbourg à Moscou – 8 (9 juillet 2010)

Comme chaque nuit, notre «Nekrassov» a parcouru une bonne distance, en remontant la Volga sur plus de 200 kilomètres.
Le speaker nous annonce tout doucement dans notre cabine que nous sommes en vue d'Ouglitch (Углич), une autre ville princière faisant partie de «l'Anneau d'Or».
Petit déjeuner-buffet copieux avec crêpes et kasha (sarrasin concassé grillé), avant d'entamer la visite du Kremlin d'Ouglitch. Dès que nous sommes à terre, nous sommes escortés de près par 2 spécimen locaux, mère et fille.
Nos 2 belles sont, d'après notre guide, des habituées de la parade lorsque se présentent les bateaux de croisière. Etonnament, elles ne demandent rien, ni argent, ni contrepartie d'aucune sorte ! Elles nous accompagnent jusque sur les lieux sacrés, la mère derrière la fille, au pas cadencé et la poitrine en avant. Certaines guides, sans doute un peu jalouses de la concurrence, ont eu beau essayer de les faire chasser par la police, rien n'y a fait ! Nous pénétrons en bonne compagnie dans le Kremlin d'Ouglitch, à 200 m du débarcadère. Kremlin en russe signifie citadelle, et beaucoup de villes anciennes ont le leur. Ici, il ceinture les 2 églises remarquables, la Cathédrale de la Transfiguration et l'Eglise Saint-Dimitri-sur-le-Sang-Versé.
La première, aux bulbes verts, a une belle galerie d'icônes
Le nom de la seconde évoque un meurtre: il s'agit de l'assassinat du Tsarévitch (héritier du Trône) Dimitri par les sbires de Boris Godounov. Boris était un noble d'ascendance tatare. Son nom, Godounov, signifierait «irréfléchi» en tatare, caractère qui n'était pas vraiment le sien pourtant. Qu'on en juge : Boris Godounov est le beau-frère du Tsar Fédor I, un personnage simplet qui a succédé à son père Ivan le Terrible. Boris devient petit à petit, à force d'intrigues, le détenteur du pouvoir de fait, et fait assassiner à Ouglitch en 1591 l'héritier du Trône, le demi-frère de Fédor, Dimitri. 200 témoins gênants sont exécutés et la population d'Ouglitch est déportée en Sibérie (Staline avait déjà quelques précurseurs …). A la mort en 1598 de Fedor I sans héritier, Boris Godounov peut prendre le pouvoir et fonder une nouvelle dynastie russe. L'Eglise Saint-Dimitri-sur-le-Sang-Versé, avec ses bulbes bleus étoilés, a été construite sur le lieu du crime. Ses murs sont peints en rouge, couleur du sang.
Les fresques dont l'une représente l'assassinat de Dimitri
L'iconostase
Ouglitch était, du temps de l'Union Soviétique, connue pour sa manufacture de montres qui employait plus de 10 000 personnes. Depuis 1990, seuls les modèles «de luxe» sont encore commercialisés :
A ce sujet, une petite histoire drôle qui se passe dans l'ex-URSS: Des visiteurs occidentaux se promènent à Moscou, accompagnés d'un guide de l'agence officielle Intourist. Tout d'un coup, l'un d'eux se précipite, très énervé, sur le guide et l'apostrophe en ces termes : «Camarade, un touriste suisse vient de me voler ma belle montre soviétique !». Le guide, perplexe, lui répond alors : «Tu veux dire qu'un touriste soviétique vient de te voler ta belle montre suisse ?». le visiteur occidental réplique : «Si c'est toi qui le dit, camarade, je suis d'accord.»
Pour revenir au bateau, on doit prendre un chemin piéton au bord duquel s'amassent des dizaines d'étals de souvenirs : matriochkas, petits soldats, poupées russes,


tee-shirts
où le portrait de Staline est encore présent ! Depuis la fin de l'Union Soviétique, on assiste en effet à un certain «retour» du Petit Père des Peuples. C'est difficilement concevable pour nous de comprendre comment on peut ouvertement porter l'effigie d'un dictateur qui a 40 millions de morts sur la conscience, après la révélation de ses crimes dès les années 50 en URSS même. Mais ainsi va la Russie contemporaine, encore fascinée par les pouvoirs brutaux ... Récemment, on a évité de peu, d'après une touriste russe qui voyage avec nous, que de gigantesques portraits du dictateur soient portés sur la Place Rouge pendant le défilé militaire qui a commémoré le 65ème anniversaire de la fin de la Deuxième Guerre Mondiale; nombre de militaires et les nostalgiques des années soviétiques considèrent toujours Staline comme le général en chef des armées russes victorieuses.
Avant de remonter sur le bateau, une paysanne vend aux touristes un petit bouquet de pâquerettes ramassées dans les champs. Spectacle d'une misère digne, mais d'une misère épouvantable ... qui explique peut-être en partie que Staline connaisse un regain de popularité …
Notre bateau remonte la Volga jusqu'à croiser le clocher de l'Eglise engloutie de Kaliazine. Au fond, les Grandes Oreilles de la Russie.
Les mouettes se lèvent au passage du «Nekrassov» :
En fin de soirée, Lénine nous indique que nous entrons dans le Canal de Moscou.
«La Croisière s'amuse» pour ce dernier soir à bord. L'orchestre joue les romances russes reprises par les passagers et le groupe des amateurs de danse, dont fait partie Michèle, nous interprète son spectacle inoubliable de fin de séjour:

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