vendredi 10 avril 2015

Traversée indochinoise (35) : Dans les montagnes du Vietnam du Nord, de Hanoï à Nghia Lo


Pour la dernière séquence de notre voyage, nous avons une nouvelle guide, jeune (24 ans) et très sympathique. Elle s'appelle Duyên et suggère que nous l'appelions Joëlle, un prénom français dont la prononciation se rapproche du sien pense-t-elle (?).
Ce soir, c'est le grand soir, le Réveillon de la Fête du Têt ! Mais au départ de Hanoï, nous n'en sommes pas encore là. Nous partons pour le Nord du pays, aux confins du Laos et de la Chine où nous allons rencontrer quelques unes des "ethnies minoritaires" du Vietnam et aussi de beaux paysages de rizières en étages. Première étape Hanoï- Nghia Lo.
Par comparaison avec les autres jours, il y a peu de circulation dans les rues de la capitale, d'habitude complètement saturée de motos. De nombreux magasins ont abaissé leurs rideaux de fer. On nous a prévenu, les jours de la Fête du Têt, tout est fermé, ou à peu près ....
Malgré tout, les marchands continuent de vendre les branches de pêcher rose ou des fleurs rouges, symboles de bonheur pour la nouvelle année, ainsi que les fleurs jaunes et orange, symboles de prospérité. Il y a encore des pruniers ou des kumquats a vendre le long de la route. En moto, on transporte les cadeaux achetés pour la famille ou les amis, ou pour les autels des ancêtres : friandises, fruits, gâteaux de riz gluant, tableaux.
Après plus d'une heure, on sort du Grand Hanoï, agglomération habitée par 10 millions de personnes, pour traverser une région très plate de rizières alimentées en eau par le Fleuve Rouge. 
Au milieu des rizières, des tombes individuelles. C'était autrefois la coutume d'enterrer ses morts sur sa parcelle (cela empêchait aux héritiers de vendre le terrain)
mais la suppression de la propriété privée dans les années 1950 a conduit les autorités à décider le regroupement des tombes dans des cimetières de village ou bien dans les cimetières militaires pour les soldats morts pendant les 2 guerres d'Indochine. 
3 millions de Vietnamiens, c'est une estimation, ont perdu la vie dans ces 2 conflits. 2 fois plus que les Français durant la Grande Guerre ! 
Dans cette plaine, les maisons sont beaucoup plus cossues. De belles maisons à colonnades à 2 ou 3 étages sont construites au dessus des commerces qui jalonnent la grande route qui mène de Hanoï à Lao Cai, à la frontière chinoise.
La route de Nghia Lo traverse petit à petit des zones de plus en plus montagneuses avec des maisons plus modestes aux toits de chaume. Nous pénétrons dans le pays Thai. Quelques rizières en terrasse font leur apparition. Cela fait 700 ans que les Thais cultivent du riz dans des champs irrigués.
Puis ce sont les plantations de thé qui occupent et modèlent les collines. 
Après un déjeuner simple en route, chez un restaurateur catholique qui pratique aussi le culte des ancêtres, on continue la route. 
Séance de massage pour chauffeur
L'étal du boucher local
Arrivée assez tôt à Nghia Lo, dans la capitale des Thaïs Noirs, lieu d'une importante bataille entre Français et Vietminh pendant la Guerre d'Indochine. Les femmes portent des coiffes de couleurs vives (un grand châle qu'elles plient sur leur tête)  et des jupes noires serrées.
Duyên nous propose d'aller faire un tour dans un village traditionnel situé au milieu des rizières. Les maisons sont construites en bois de fer et bambou, sur pilotis.
Une famille Thai propose de nous faire visiter sa maison et de nous offrir une petite collation. La grand mère qui porte un enfant sur le dos est habillée en costume traditionnel, de couleur très vive. 
Dans la maison sur pilotis, une grande pièce est divisée en plusieurs chambres par de tentures : une chambre pour les grands parents, une chambre pour le fils aîné et sa femme, une chambre pour le fils cadet, une chambre pour les filles quand elles reviennent à la maison familiale, une chambre pour les petits-enfants. Et un espace commun ou on nous fait asseoir sur un grand canapé en bois, en nous servant du thé, de l'alcool de riz et des bombons ... 
Que ces gens, bien que pas très riches, sont accueillants ! Et ils nous proposent encore de nous inviter pour le réveillon de ce soir ...
En revenant à pied à notre hôtel, comme nous avons vu un enfant victime d'une maladie de peau, Duyên. nous parle du système de santé vietnamien qui ne marche pas bien, avec une corruption généralisée. Le problème n'est pas la compétence des praticiens. Mais pour être bien soigné et à temps, il faut payer des dessous de table aux médecins et aux infirmiers. L'origine de cette situation est à rechercher dans le niveau des salaires qui est ridiculement bas (respectivement 150 et 50 dollars par mois). Pour Duyên, le pouvoir politique est totalement responsable de cet état de fait. Encore une qui n'est pas persuadée de la supériorité du modèle communiste ...
Le Réveillon approche et tous les restaurants sont fermés. Notre chauffeur nous a dégoté pour ce soir un dîner dans une famille Thai. Nous sommes chaleureusement accueillis et partageons le repas avec la famille. Tous les plats sont posés dans des récipients à même le sol, et nous, sommes assis en tailleur sur la natte du plancher. On peut goûter aux mets traditionnels du Réveillon : bœuf piquant, poulet au pousses de bambou, saucisson cuisiné au caramel, "broutches" (ça, c'est une appellation déposée par Mado, qui appartient à la minorité ethnique béarnaise, pour donner un nom à des légumes verts en branche) ... Et le tout accompagné d'alcool de riz à profusion, fabriqué maison. Dans ces conditions, pas besoin de parler Thai pour se comprendre !
Pour finir la soirée, un spectacle de danses Thai exécutées par les jeunes filles du village nous est proposé. Cela finit en danse avec elles dans l'allégresse  ! Quel accueil ! 
Quelle bonne soirée pour ce Réveillon de Jour de l'An ! Duyên et le chauffeur sont un peu moins tristes de l'avoir passé loin de leurs familles ... Comme dans tous les pays du monde, le Jour de l'An commence par un feu d'artifice, même ici à Nghia Lo! Et la télé retransmet celui, grandiose, de Hanoï au dessus du Lac Hoan Kiem où nous étions hier soir.
A Nghia Lo, vu du balcon de notre hôtel
A Hanoï

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